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Stupeflip
Paru en 2011

Contexte de parution : The Hypnoflip Invasion (Dossier de Presse)

Présentation :

Texte réalisé pour le dossier de presse réalisé à l'occasion de la sortie du 3ème album de Stupeflip : The Hypnoflip Invasion.


Sujet principal : Stupeflip
Cité(s) également : plusCharlie Schlingo, Gene & Dean Ween, Jacno, Laurent Baffie, Mylène Farmer, Pierre la Police, menu_mondes.pngResidentsmenu_mondes.png




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Le 11 septembre 2001 : rien. Mais le 6 novembre, Stupeflip entre en studio pour produire son premier maxi. Dès ses premiers titres, en même temps qu’il invente son style, mélange de petits samples inquiétants, de boucles immatures, de rythmes enivrants et d’airs insistants comme des parfums, avec des parties chantées passant de « rappé-hurlé » à « chanté-gémi », le groupe déploie une mythologie dans lequel il s’inscrit comme son « extension ». C’est le C.R.O.U., « là, entre autres, pour terroriser la population ». Stupeflip est une sorte d’Al-Quaïda du Gentil. L’ego trip typique du Rap West Coast – presque toutes les chansons de Stupeflip présentent et re-présentent ses personnages, Pop-Hip, Kingju, Cadillac, MC Salo – y est doublé comme une fourrure par une annihilation du moi pathético-parodique. Toute tentation autobiographique est exorcisée dans la Grande Fiction. La justification de son combat est déplacé dans un monde imaginaire, à la fois grandiose et larvaire, replié sur lui-même comme un hérisson. Les chansons parlent, avec une drôlerie pleine de compassion, des laissés pour compte, des ratés, des monstres ; en quoi le groupe montre des affinités évidentes avec les Residents, Ween, mais aussi les bandes dessinées de Charlie Schlingo ou de Pierre la Police (mais : « faut qu’ils mettent une étiquette, genre ça ressemble à machin, machin ou machin, et toi, machin, tu ressembles à quoi ? ») Signé sur Voston & Limantell, un label de BMG, le premier album sort en janvier 2003.

Stupeflip commence alors à bénéficier d’une célébrité empoisonnée grâce à un morceau inhabituellement sucré « Je Fume Pu d’Shit » (avec Jacno). Le groupe fait plusieurs apparitions médiatiques tragi-comiques (MCM ; « Paris Dernière » et surtout un « Tout le monde en parle » apocalyptique où Baffie veut leur envoyer son poing à la figure parce qu’ils gâchent le blind test) et se fait violemment engueuler par BMG qui estime qu’ils ne savent pas faire leur promo. En 2005, la maison de disque décidant d’une promotion proche de zéro, le deuxième album, « Stup Religion » passe relativement inaperçu. Dommage : plus ambitieux encore que le premier, il déploie la dimension mythique du groupe dans une signification outrancièrement sectaire. Le Stup s’y affirme comme un culte, ce qu’il est réellement pour ses fans, obsédés, maniaques, qui vivent désormais en s’orientant selon les énoncés du groupe. BMG rompt leur contrat en 2006, et un long procès s’ensuit, gagné par la maison de disques, qui aboutit au retrait des albums dans les rayons.

En 2010, sort « Le DVD » qui contient un documentaire de 50 minutes ainsi qu’un enregistrement en concert de 40 minutes. Les bénéfices de ses ventes servent au financement du troisième album. C’est « The Hypnoflip Invasion ». Il commence par l’affirmation « Le Stupeflip C.R.O.U. ne mourra jamais » et le deuxième morceau déclare que le C.R.O.U. a disparu en 1999. Tout meurt tout le temps dans Stupeflip et tout bascule au passé. Fabien Pollet meurt en 1979, Kingju est déjà mort, Pop-Hip se fait tuer. On doit comprendre également cela : Stupeflip n’évoluera pas, il se développera comme une spirale fermante jusqu’à l’antériorité du Grand Rien, qui se confond avec le moment de la naissance. L’objectif n’est pas d’avancer, mais de rester attaché obsessionnellement sur les références les plus terrifiantes de l’enfance. Produits sur une décennie, les trois albums de Stupeflip suivent une ligne extrêmement proche où la fin de chaque album forme le commencement du suivant. Entre les chansons, des intermèdes posent le décor ou commentent la narration, et chaque disque se termine par un tour de force de plus de sept minutes, où des monologues apocalyptiques se succèdent sur des musiques répétitives à grande intensité dramatique.

« The Hypnoflip Invasion » va jusqu’au bout de l’embarrassant. Dans ce troisième disque, plus fou et plus beau encore que les deux premiers, Stupeflip dessine la fleur transfiguratrice d’un hilarant pathétique. Rempli de récits d’amour paradoxaux (« Gaëlle », « Gém les Moch ») il est à la fois plus désenchanté et plus joyeux. De « Foule Sentimentale » à Mylène Farmer, du fromage Kiri aux images Pannini, rien n’est chic ni cool dans ce que raconte Stupeflip, tout est flippant parce que tout est vrai : vrai le pathos d’enfant malade qui a peur d’être pris pour fou, vrai le « spleen des petits », vrai la rage d’en finir avec un monde mauvais et tous ses émissaires (« je les déteste »). Le disque s’achève sur un monologue très drôle et très triste sur le crayon Titi : « Eh, tu sais ce que j’ai au bout des doigts ? J’ai un crayon Titi. Eh ouais, un crayon avec une tête de Titi au bout. Et avec ce crayon Titi, je vais écrire un maximum de trucs, parce que j’ai envie de bouffer la Terre entière. Je vais vous stupéfier avec mon crayon Titi, parfaitement. Je vais vous scotcher à base de samples de ouf qui emportent la tête. J’vais vous titiiser la cervelle. J’vais en faire du flan alsa rien qu’avec mon crayon Titi. » Mais la grande Vengeance, c’est de refaire le monde, miette après miette : « Prendre des ptits bouts de trucs et puis les assembler ensemble. »